Le sujet m'a intéressé, et assez logiquement, je me suis posé la question de savoir quel impact cela peut avoir pour un baha'i.
D'entrée de jeu, il faut souligner que les baha'is parlent toujours de l'interdiction qu'ils ont de s'engager en politique.
Baha'u'llah exprime cela en des termes allégoriques.
"Que nul ne lutte contre ceux qui détiennent l’autorité sur le peuple.Cela est précisé par une citation de Shoghi Effendi (le Gardien de la foi baha'ie) qui dit :
Laissez-leur ce qui leur appartient, et dirigez votre attention vers le
coeur des hommes."
"Il est de leur devoir, d’une part, de manifester le caractère apolitique de
leur foi et, d’autre part, d’affirmer leur loyauté et leur obéissance sans
réserve envers tout ce qui représente le jugement réfléchi de leur gouvernement
respectif."
A mon sens, il faut comprendre l'affirmation de non implication en politique comme l'interdiction de s'engager en politique politicienne, car le message baha'i de transformation de l'humanité et toutes ses implications sont éminements politiques.
Non seulement la foi baha'ie est apolitique, mais la loyauté au Gouvernement, qui impacte nécessairement l'expression de l'opinion politique en imposant une sorte de devoir de réserve, est un sujet à elle toute seule.
"[...] Quel que soit le pays où ils résident et aussi développées que soientLes baha’is obéissent aux lois tant que la soumission à ces dernières n’implique pas de renier leur foi. A ce sujet, la situation des baha'is d'Egypte (en anglais), toujours privés de papiers d'identité du fait de leur conviction religieuse, est topique, et abordée sous un autre angle encore ici (en anglais aussi).
leurs institutions, ou aussi profond que soit leur désir de faire respecter les
lois et d’appliquer les principes énoncés par Bahá’u’lláh, ils subordonneront
sans hésitation l’action de telles lois et l’application de tels principes aux
exigences et aux décrets légaux de leurs gouvernements respectifs. [...]"
Les baha'is obéissent, mais n'hésitent pas si nécessaire à faire valoir leurs droits par toutes les voies légales (comme l'illustre cette histoire, ou encore la démarche des baha'is allemands - en allemand).
Mais alors pour en revenir à la politique, dans ce contexte, qu'est-il possible de dire? de faire? Les baha'is peuvent faire valoir leurs droits par les voies légales, mais n'ont-ils pas le droit de participer au débat public? Doivent-ils s'en désintéresser pour se concentrer "sur les coeurs des hommes" selon l'injonction de Baha'u'llah?
Eh bien non, bien au contraire...Shoghi Effendi écrit aussi :
"Il devrait être parfaitement clair qu’une telle attitude ne suppose pas la
moindre indifférence à l’égard de la cause et des intérêts de leur propre pays,
ni quelque insubordination de leur part à l’autorité de gouvernements reconnus
et établis."
Encore mieux...
"Elle ne constitue pas non plus une répudiation de leur obligation sacrée de promouvoir, de la manière la plus efficace, les meilleurs intérêts de leur gouvernement et de leur peuple."Et même encore plus fort :
"Elle dénote le désir, que chérit chaque disciple véritable et loyal de Bahá’u’lláh, de servir, de façon désintéressée, discrète et patriotique, les plus hauts intérêts du pays auquel il appartient, et d’une manière qui n’entraînerait aucune déviation des normes élevées d’intégrité et de véracité associées aux enseignements de sa foi."Ce dont il est question est un sain patriotisme.
Les baha'is ont des opinions politiques, qui sont différentes selon la sensibilité de chacun. Ils ont l'obligation sacrée de promouvoir les meilleurs intérêts de leur peuple, mais ne peuvent pas faire de politique politicienne.
Ils doivent se garder de points de vue indiquant un manque de loyauté au Gouvernement, mais cela n'exclut pas de pouvoir émettre des critiques constructives, à condition qu'elles ne puissent jamais être perçues comme un "point de vue baha'i" qui en matière de politique humaine n'existe assurément pas.
Il s'agit en somme d'un devoir de réserve et de modération dans l'expression qui permet de participer à enrichir le débat public, sans entrer dans des considérations de politique politicienne ou de personnes, en faisant prendre un peu de hauteur au débat, hauteur dont il manque souvent.
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